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Dans mon chaudron, je verse un peu de verveine, un soupçon d’arsenic, de la mandragore fraîchement coupée, et surtout je ne lésine pas sur le jus de crapaud ! Je laisse mijoter quelques heures pour obtenir une pommade, certes nauséabonde, mais drôlement efficace. Je m’en enduis tout le corps. Ca colle. J’enfourche mon vieux balai et je marmonne la même incantation 3 fois de suite. Et pouf ! … Ma voisine de droite me regarde du mauvais œil, j’ai fait du bruit en laissant tomber mes notes. Ca m’apprendra à rêvasser ! 


Je reprends le fil de la conférence sur la sorcellerie et superstitions en Espagne à l’époque moderne (XVème – XIXème siècles), proposé par Nicolas Diochon, professeur agrégé en espagnol et doctorant à l’UBO. J’apprends que la sorcière espagnole se déplace à dos d’âne ou de chat, et non pas sur un balai comme sa consœur française. Ainsi se rend-t-elle au Sabbat pour festoyer avec le démon et ses disciples, boire du sang, et manger des enfants fraîchement égorgés ou de la chair humaine en décomposition… Pas très sympathiques, la sorcière… Heureusement, il existe à l’époque des « connaisseurs de sorcières ». Spécialistes en sorcellerie, détenteurs d’une licence pour exercer, ils accompagnent les juges, les inquisiteurs dans leurs enquêtes. Plusieurs astuces pour reconnaître une sorcière à coups sûr : observer bien l’œil droit… brûlant comme l’enfer ! Une boursoufflure, une cicatrice en forme de pattes de coq, de grenouille ou de lièvre sur la paupière... Piquez-là ! Rien ne se passe ? Vous avez affaire à une harpie ! Le conférencier évoque également une peur assez répandue : la pratique du mauvais œil. Il se disait à l’époque que lors de leurs menstruations, les femmes devaient expulser le « venin » qu’elles avaient en elles. L’œil était l’une des « fenêtres naturelles ». Lorsqu’une femme regardait un enfant et que celui-ci tombait malade ou mourrait dans les 3-4 jours, elle en était responsable. Elle avait le mauvais œil ! Pour être sûr à 100% qu’on est bien en présence d’une sorcière, une méthode simple : la noyade. Si la personne accusée est une hérétique, elle remontera à la surface malgré les poids lestés sur ses pieds et poings liés. Sinon, mea culpa post mortem du « connaisseur de sorcières »… 

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Nicolas Diochon poursuit sa démonstration et évoque le dénouement d’une histoire sordide de possessions démoniaques, la plus grosse affaire d’hystérie collective enregistrée entre 1637 et 1642 en Espagne. 5 ans de procès, 62 victimes, 1 seul coupable : un jeune homme qui se faisait passer pour « connaisseur de sorcières ». Il n’avait aucune licence et aucun scrupule pour profiter de la naïveté de jeunes femmes célibataires et de bonnes familles. Pour résumer, il prétendait avoir un don de guérison qui lui venait de sa salive et surtout de sa semence… Il léchait et violait ses victimes pour les désenvoûter. Il fût inculpé par le Tribunal d’Inquisition à 10 ans d’exil sur les chefs d’accusation suivants : sorcellerie, sortilèges, magie amoureuse, divination, exorcisme, blasphèmes, sodomie, etc. J’en passe. Pour détendre l’atmosphère, Nicolas Diochon propose une gentille (= non perverse) méthode de Magie d’amour. Cela me fait penser à Monsieur Barry, célèbre ensorceleur quimpérois dont nous avons tous reçu la carte de visite, un jour ou l’autre, dans notre boîte aux lettres... Voici le sortilège amoureux de Nicolas Diochon (peut être aussi connu par Monsieur Barry ^^) pour faire revenir la paix au sein du couple : la technique des fèves. Chaque fève représente quelqu’un ou quelque chose (la femme, le mari, la maîtresse, le lit, etc.). Il suffit de prendre les fèves en main, les mélanger en récitant des prières, puis les lâcher. En fonction de la position des fèves, les résultats seront soit bons, soit mauvais. Ainsi, on sait à quoi s’en tenir… C’est plus propre (et plus facile) que la méthode de Magie d’attachement qui consiste à lié par une corde un vêtement de l’être aimé à une dent de pendu ou au doigt d’un mort (ou autre…). 

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La sorcellerie, la magie d’amour, la voyance de Pierre Pernez… a toujours intrigué. Peut-être suffit-il d’y croire finalement pour que ça marche... En tous cas, j’ai dû rentrer à pieds de l’UBO jusque chez moi, parce que mon balai a refusé de décoller… Sans doute parce que je n’avais pas d’onguent à la mandragore et au jus de crapaud ! 


Pour information, voici la liste des conférences / expositions à venir au pôle universitaire Pierre-Jakès Hélias :
Tag(s) : #Conférences - Expos
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